Vivaaa Las Vegas !
Nous avançons dans le désert du Nevada, sur ce qui semble être la dernière bande d’asphalte du monde, à travers cette immensité aride, vide, et pas franchement excitante. Quelques arbres de Joshua sur le bord de la route, la vallée de la mort à l’horizon, vers laquelle nous n’allons finalement pas.
Finalement, après plusieurs heures de route toutes fenêtres ouvertes, nous parvenons, suant, à l’orée de Las Vegas. C’est fascinant d’arriver en voiture dans une ville car, avant d’en atteindre le coeur scintillant, le centre propret et ses trottoirs balayés, il faut traverser sa périphérie, passer les sempiternelles mêmes zones industrielles, laisser passer les gens fatigués de naviguer, tourner à l’angle des immeubles délabrés, se frayer un passage parmi les débris, repoussés des trottoirs balayés. Et tandis que nos yeux se brouillent d’injustice, nous voici déjà happés par les bus touristiques, les façades rutilantes, les sourires empruntés des serveurs et les trottoirs balayés. Alors on oublie, les immondices et l’injustice, les gens sont accueillants, les cafés réconfortants...
Sauf qu’à Las Vegas, j’ai eu du mal à oublier. Parce que l’imposture se cache mal, derrière le carton pâte et les paillettes. J’ai vu les gens abimés par la drogue, les danseuses à froufrous qui déambulent sur le Strip pour une photo et quelques billets et dont le sourire s’évanouit bien vite, pour se réanimer soudainement à la vue d’un gros cinquantenaire friand de corps poudrés. J’ai vu les groupes de copains et copines fêter des enterrements de vie de garçons, des anniversaires, des mariages qui, verres à la main et colliers hawaiens autour du cou, ne voyaient pas la même chose que moi. J’ai vu des vieux fumer et boire seuls devant une machine à sous, sans joie, sans désespoir non plus, peut-être juste las.
Mais bon !
Ce serait mentir de dire que j’ai passé une journée prostrée à pleurer dans mon coin. C’était quand même une sacrée aventure urbaine, une jungle semblable à nulle autre pareille, un monde parallèle de faux-semblants et de lumières clignotantes. Laissez-moi vous parler des 3 choses qui m’ont marquée à Las Vegas :
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La première, c’est qu’il est IMPOSSIBLE de se repérer dans les casinos. Tout est fait pour perdre la notion du temps et de l’espace : pas de fenêtre, pas d’horloge, pas d’indication claire. Nous nous sommes donc littéralement perdus dans le dédale des casinos qui se rejoignent tous par des galleries souterraines. Perdus à ne plus savoir comment sortir. C’était drôle au début mais quand ça faisait quatre fois qu’on se retrouvait dans le même hall en cherchant la sortie, ça a commencé à devenir un peu angoissant !
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La deuxième, c’est Venise. Quand même. Les mecs ont recréé Venise, à l’intérieur, avec un faux ciel, un faux lagon, des fausses gondoles, et de faux gondoliers qui chantent un vrai faux italien... Venise m’a plus particulièrement abassourdie, mais ça vaut pour Paris, New-York, l’Egypte et la Rome plus ou moins antique...
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La troisième, c’est qu’on a quand même gagné 150$ ! Mais on n’a pas trop compris comment. Déjà, il nous a fallu un bon moment pour choisir une machine à sous, observer les gens jouer, oser s’asseoir, comprendre que c’était plus des pièces depuis belle lurette mais qu’il fallait recharger une carte, trouver l’endroit où se procurer la dite carte, retrouver la machine qu’on avait sélectionnée, et finalement comprendre sur quel bouton appuyer. En fait, je crois que tu peux appuyer sur tous les boutons, ça n’a pas l’air d’avoir une grande importance... Résultat des courses, la machine s’est emballée, et sur l’écran une Heidi sexy s’est mise à chanter en allemand alors que tout clignotait. On a un peu paniqué avant de comprendre qu'on gagnait de l'argent. Alors, en bons amateurs que nous sommes, on a tout de suite arrêté, retiré l’argent pour se payer un resto et nous sommes partis avec notre butin bien serré dans la poche.
Nous avons passé la nuit sur un parking qui sentait l’urine, entre une station-service et l’aéroport mais qui avait le mérité d’être proche, gratuit, et étonnament calme.
Le lendemain, nous avons repris la route vers l’Ouest, direction la Californie !